Handicap au travail : changer (enfin) de regard

Mise en ligne le jeudi 29, février 2024

Mise à jour le jeudi 29 février 2024

Camille Bataille, Content manager chez Beetween

By Camille Bataille, Content Manager

Il y a celui avec lequel on naît. Celui qui arrive avec un accident ou une maladie. Celui qui nous concerne directement ou qui touche un proche. Le handicap partage la vie d’un français sur cinq.”(Rebond, un podcast le Monde en partenariat avec l’Agefiph.)

Le handicap, qu’il soit physique, mental, sensoriel ou psychique, est une réalité qui touche des millions de personnes à travers le monde. Malheureusement, malgré les avancées législatives et sociales, les préjugés et les stéréotypes persistent, alimentant souvent l’exclusion et la discrimination. Pourtant, changer de regard sur le handicap est non seulement essentiel pour promouvoir l’inclusion sociale, mais aussi pour favoriser le respect des droits fondamentaux de chaque individu. En tant que réalité complexe, le handicap demande à être abordé sous différents angles.

Etat des lieux : emploi et handicap en France

Si l’on se concentre sur la manière dont le handicap est considéré dans le cadre du travail, le constat est mitigé et nous prouve qu’il y a encore du chemin à faire comme en atteste une récente étude de la DARES👇

Commençons par le “bonne nouvelle” : le taux de chômage des personnes reconnues handicapées recule nettement entre 2015 et 2022 ! Il serait de 12% en 2022, contre 17% en 2015. Un propos à nuancer cependant.

En 2022, seules 38 % des personnes reconnues handicapées sont en emploi, soit quasiment deux fois moins que l’ensemble de la population (68 %). Parmi les actifs, le taux de chômage est plus élevé (12 % contre un peu plus de 7 % chez les personnes dites “valides”), et le chômage plus souvent de longue durée (5 % contre 2 %).

Et ce, malgré les obligations légales dont la plus connue est la suivante : les entreprises de plus de 50 salariés doivent embaucher un minimum de 6% de travailleurs reconnus handicapés, c’est-à-dire ayant monté leur dossier RQTH (reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé).

80% des handicaps sont considérés comme « invisibles », mais ce n’est pas une raison pour invisibiliser le handicap.

Autre phénomène, et pas des moindres : de nombreux salariés ayant un handicap le plus souvent invisible n’osent même pas monter leur dossier RQTH, et je parle d’expérience. Pourquoi ? Tout simplement par peur d’être pénalisés ou encore discriminés dans le cadre de l’emploi. Et ça, c’est dramatique. Car au lieu de faire valoir leur dossier RQTH et donc avoir rapidement un siège adapté par exemple, les travailleurs handicapés se contentent de souffrir en silence. Et nul doute que nous sommes moins productifs quand nous subissons des douleurs musculaires ou autre…

Sensibiliser en entreprise : les aides financières possibles

Avant de vous présenter quelques actions pour sensibiliser aux handicaps dans votre entreprise, sachez que dans certaines conditions, les actions de sensibilisation menées peuvent être déductibles de votre contribution Agefiph. On retrouve par exemple dans les dépenses déductibles :

  • La réalisation de diagnostics et de travaux afin de rendre les locaux accessibles.
  • La participation à des événements promouvant l’accueil, l’embauche directe et le maintien dans l’emploi de travailleurs handicapés dans l’entreprise.
  • Les partenariats à travers une adhésion ou une convention avec des associations ou organismes œuvrant pour la formation, l’insertion sociale et professionnelle de personnes handicapées que l’employeur accueille ou embauche.

Pour connaître le détail des dépenses déductibles (et les conditions), c’est par ici

#1 Informer sur les handicaps

Apprivoiser la diversité du handicap

La première étape pour changer de regard sur le handicap consiste à informer sur sa diversité. Le handicap ne se résume pas à une seule condition, mais englobe une multitude de situations, qu’elles soient physiques, mentales, sensorielles ou psychiques. En s’informant sur les différentes formes de handicap, leurs causes et leurs conséquences, nous sommes mieux équipés pour comprendre les défis auxquels font face les personnes en situation de handicap au travail.

Et par défi, j’entends des vrais défis, au sens littéral du terme. L’exemple le plus parlant est sans doute celui de la personne en fauteuil roulant. Quand vous êtes en fauteuil, de nombreux obstacles vous attendent :

  • des trottoirs trop étroits.
  • des trottoirs remplis de nid de poule.
  • des places réservées utilisées par des personnes pourtant valides. 😡
  • etc.

La preuve par l’image avec ce mini-reportage Brut, que vous avez sans doute vu passer .

Ce qui me fait dire ceci : personne n’a une capacité d’adaptabilité aussi énorme que les personnes en situation de handicap. Ça vaut pour les personnes en fauteuil tout autant que pour les personnes malentendantes par exemple. Imaginez l’effort et l’énergie que cela demande de lire sur les lèvres, et encore, quand c’est possible !

Mais revenons à nos moutons. Pour informer sur le handicap au travail, deux possibilités :

  1. Vous informer par vous-même, mais avec le risque de mal interpréter les infos ou déformer inconsciemment les informations délivrées.
  2. Faire appel à un spécialiste du sujet pour ouvrir le dialogue en entreprise.

Quelques ressources sur le sujet

#2 Sensibiliser sur les handicaps

Promouvoir l’inclusion

La sensibilisation à l’inclusion est essentielle pour changer de regard sur le handicap. Autrement dit, il s’agit de reconnaître que chaque individu, quel que soit son handicap, a le droit de participer pleinement à la société. En sensibilisant à l’importance de créer des environnements accessibles et inclusifs dans tous les domaines de la vie, nous pouvons encourager une culture de l’inclusion et de la diversité.Et à ce niveau, plusieurs “petites” choses peuvent grandement changer la donne, la plus importante étant de respecter le choix de vocabulaire des personnes concernées !

  • Éviter le langage stigmatisant : “Handicapé”, “invalide”, “déficient”… les mots utilisés pour identifier des personnes en situation de handicap sont souvent stigmatisants. Or, la sensibilisation passe également par l’utilisation d’un langage respectueux et inclusif. Il est important d’éviter les termes péjoratifs ou réducteurs lorsqu’il s’agit de parler de handicap, et de privilégier un langage qui met en valeur la personne avant le handicap.
  • Proscrire l’utilisation des noms de maladies mentales sans certitude : A cela, plusieurs raisons. Quand vous utilisez les noms de maladies mentales dans des situations inappropriées, vous déclenchez une banalisation de ces maladies, ou carrément, une incapacité à partager son vécu. Je m’explique : l’expression “bipolaire”, par exemple, est parfois utilisée pour décrire une personne lunatique. Oui, mais la bipolarité, c’est une maladie psychique chronique. C’est la même chose avec “schizo” parfois utilisée pour décrire une personne qui fait quelque chose de “fou”. Sauf que la schizophrénie est une maladie psychique qui peut avoir de très lourdes conséquences. Sans compter que les personnes concernées par ces différents handicaps peuvent recevoir en pleine figure lorsqu’elles se confient des réactions du type “on est tous et toutes un petit peu comme ça”. Sauf que non. Il s’agit de maladies psychiques qui nécessitent la prise, parfois très lourde, de traitement, et un suivi psy régulier. Et c’est une différence de taille.
  • Bannir les tournures de phrases péjoratives : Une tournure de phrases péjoratives pour parler de handicap, c’est par exemple dire “souffre de”, “est victime de” ou “est affectée” par un handicap. Pourquoi ? Parce que cela véhicule une vision péjorative du handicap, et alimente une vision passive de la personne concernée. Notre conseil ? Dites plutôt qu’une personne “est” en situation de handicap.

Quelques ressources sur le sujet

Pour vous sensibiliser, voici le nom de quelques personnalités Linkedin qui abordent ces sujets pour lever le tabou du handicap, et notamment au travail 👇

  • Klémence Guiot : Klémence est rédactrice de contenus, mais elle aborde aussi des sujets relatifs au handicap et notamment l’autisme. Elle participe grandement à lever le tabou du handicap au travail et montre comment elle a fait de son handicap un atout dans son activité pro.
  • Lucie Leclercq : Journaliste handicap indépendante, Lucie est aussi animatrice d’ateliers de sensibilisation en entreprise. Elle vient d’ailleurs de lancer son podcast Handi with Lucie. Son podcast a la volonté de parler des évolutions professionnelles et des carrières des personnes en situation de handicap. Le premier épisode sortira le 20 mars !

#3 Agir en faveur de l’inclusion des travailleurs handicapés

Engager des actions concrètes

Pour concrétiser le changement de regard sur le handicap, il est nécessaire de passer à l’action. Cela peut se traduire par le soutien à des initiatives inclusives, telles que des événements accessibles à tous, des campagnes de sensibilisation ou des programmes d’emploi pour les personnes handicapées. Agir pour changer de regard sur le handicap implique d’encourager l’empathie et l’interaction avec les personnes en situation de handicap. En prenant le temps d’écouter leurs histoires, leurs expériences et leurs perspectives, nous pouvons développer une meilleure compréhension mutuelle et contribuer à construire une société plus inclusive.

Démystifier les idées reçues

Le handicap est souvent entouré de stéréotypes et de préjugés qui alimentent la discrimination. En informant sur les réalités du handicap, en déconstruisant les idées reçues et en corrigeant les fausses croyances, nous pouvons contribuer à briser ces barrières et favoriser une vision plus juste et respectueuse des personnes handicapées. Tiens ça me donne envie de tester vos connaissances sur le sujet. Vous êtes prêts ?

PS : si vous avez lu attentivement l’article jusqu’ici, vous devriez déjà avoir quelques pistes de réponses ! 😉

quizz emploi & handicap les questions

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Réponse en fin d’article, mais attention, je vous fais confiance, pas de triche ! 😉

Faire des mises en situation

Se mettre dans la peau d’une personne en situation de handicap, vivre sa vie le temps d’une animation, ça marque les esprits et ça permet de faire bouger les lignes. Vous pouvez par exemple :

  • Proposer une immersion dans le noir : les participants sont sensibilisés au handicap visuel de manière originale par le biais de dégustation à l’aveugle, manipulation d’objets, lecture du braille et d’informations imprimées en thermogonflé…
  • Organiser un atelier “café silence”, ou “café signe”. L’objectif étant que des personnes sourdes, malentendantes et entendantes se rencontrent et partagent un moment agréable autour d’un café.
  • Faire un rallye en fauteuil roulant.
  • Inviter les collaborateurs à une initiation lecture du braille ou langue des signes.
  • Planifier une session Cécifoot : le cécifoot étant du football sans la vue. Il est joué par des athlètes ayant un handicap visuel, avec un ballon qui émet un son en roulant.

En combinant ces trois étapes – informer, sensibiliser et agir – nous pouvons tous jouer un rôle dans le changement de regard sur le handicap et contribuer à créer une société plus inclusive, respectueuse et solidaire.

Les réponses 

Camille Bataille, Content manager chez Beetween

By Camille Bataille, Content Manager

Véritable food trotteuse et grande amoureuse des livres, quand je n'écris pas sur l'univers RH, je partage mon temps entre le marque-page et la fourchette !🍴